Dans une étude récente publiée dans « Diabetes », l’équipe de Francine Béhar-Cohen, au Centre de Recherche des Cordeliers, montre que le récepteur aux minéralocorticoïdes (RM) et certains de ses ligands sont surexprimés dans la rétine des patients atteints de rétinopathie diabétique. L’injection intraoculaire de spironolactone à libération contrôlée, qui bloque spécifiquement les RM, entraîne une réduction de la réponse inflammatoire précoce et de l’œdème rétinien et diminue la perméabilité vasculaire associée aux rétinopathies diabétiques avancées chez le rat. Ces résultats sont un progrès majeur dans la compréhension des mécanismes de la rétinopathie diabétique et constituent une piste thérapeutique précieuse pour le traitement des rétinopathies précoces et avancées.
La rétinopathie diabétique est une complication grave du diabète qui touche 50% des patients diabétiques de type 1 et 30% des patients diabétiques de type 2 après 10 ans. Elle est la première cause de cécité avant l’âge de 60 ans et sa principale caractéristique est la présence d’un œdème maculaire.
Actuellement, les principaux traitements pour réduire l’œdème maculaire sont les injections intraoculaires répétées d’anti-VEGF ou de glucocorticoïdes. Les anti-VEGF neutralisent les effets délétères des membres de la famille du facteur de croissance endothélial vasculaire (VEGF) empêchant l’augmentation de la perméabilité des barrières hémato-rétiniennes et l’induction de l’angiogenèse, tandis que les glucocorticoïdes jouent, en plus d’un rôle anti-angiogénique, un rôle anti-inflammatoire. Cependant, ces traitements ne sont pas efficaces chez tous les patients. C’est pourquoi, il nous a semblé important de mettre au point de nouvelles approches thérapeutiques.
L’activation de la voie minéralocorticoïde est impliquée dans les pathologies associées au diabète (cardiopathies et néphropathies entre autres), via son action pro-inflammatoire, pro-oxydante et pro-fibrotique. Des études précliniques et cliniques ont montré les effets bénéfiques des antagonistes du RM pour réduire la protéinurie et ralentir la progression de la néphropathie chez les sujets diabétiques.
Cependant, le rôle du RM n’a jamais été étudié dans la rétinopathie diabétique. Notre étude publiée dans « Diabetes » a montré une surexpression du RM dans la rétine des patients atteints de rétinopathie diabétique, et identifié le cortisol, le glucocorticoïde endogène, comme le principal ligand du RM dans l’œil des patients. La lipocaline 2 et la galectine 3, qui sont les cibles du RM et des biomarqueurs des complications diabétiques, étaient également augmentées dans la rétine diabétique humaine. L’ensemble de ces résultats témoignent d’une suractivation de la voie du RM dans la rétinopathie diabétique.
Nous avons testé l’effet d’une libération contrôlée intraoculaire de spironolactone, un antagoniste très puissant du RM, chez le rat Goto-Kakizaki (GK), modèle animal de diabète de type 2. Nos résultats démontrent que ce traitement entraîne une réduction de l’inflammation précoce et de l’œdème rétinien, et une diminution de la perméabilité vasculaire dans la rétinopathie diabétique avancée chez ces rats GK.
Notre étude contribue à une avancée dans la compréhension des mécanismes de la rétinopathie diabétique. Le blocage du récepteur aux minéralocorticoïdes, qui cible un ensemble de manifestations pathologiques associées à la rétinopathie diabétique, représente une nouvelle voie thérapeutique à fort potentiel à explorer.
Contacts :
Min Zhao : min.zhao@inserm.fr
Francine Behar-Cohen : francine.behar@gmail.com
Lien vers l’article : https://diabetesjournals.org/diabetes/article/70/11/2668/123873/Mineralocorticoid-Receptor-Pathway-and-Its